Publiés pour la première fois en 1947 dans une Allemagne exsangue et occupée, les textes de Heinz Berggruen sont plus qu'un témoignage sur une époque particulière de l'histoire allemande. Écrits sur le vif dans le tumulte de l'après-guerre, ces courts récits font écho à tous les doutes et lâchetés que le Troisième Reich a laissés à la nation allemande. Berggruen montre ses compatriotes déchirés entre la culpabilité et le refus de se sentir impliqués dans le drame du nazisme. En saynètes caustiques, impitoyables et pourtant empreintes d'une certaine tendresse, il saisit la vérité des petits gens qui se débattent dans l'opportunisme, le désespoir et l'incompréhension. Les monologues, les lettres et les dialogues sont ici émaillés de coupures de presse authentiques qui viennent compléter cette image drolatique et tragique du Berlin occupé. « Jeune femme, employée de bureau, donne des cours de démocratie le soir après dix-huit heures... » propose l'une d'elles; c’est justement l’apprentissage de la démocratie qui reste au cœur des préoccupations de Berggruen, la difficulté de renaître et de retrouver la morale, en politique et au quotidien. Toutes ces questions n’ont rien perdu de leur actualité,ni dans l'Allemagne réunifiée, ni dans d’autres pays européens, qu’ils aient connu le régime communiste ou les affres de la dictature ou de la guerre civile.