Mrożek rentre du Mexique à Cracovie en 1996 et devient aphasique à la suite d'une hémorragie cérébrale en mai 2002. Il invente alors Balthazar, son alter ego, un personnage à part entière. Grâce à lui, nous remontons dans le temps jusqu'à l'enfance et la jeunesse de l'auteur, avant son exil en 1963. Mrożek connaît l'occupation nazie, la Libération, les années de privation, la construction de la République populaire. Élève timide, étudiant en architecture et aux Beaux-Arts, journaliste débutant, caricaturiste pour un hebdo satirique, collaborateur d'un cabaret, il ne compose sa première pièce de théâtre, La Police, qu'en 1958. Dès lors il a trouvé sa voie. Il ne rompt avec la Pologne officielle qu'en 1968, déjà à l'étranger, après l'intervention des troupes du pacte de Varsovie à Prague.
Dans un exercice rare et touchant pour un être aussi pudique, il nous dévoile sa lutte pour regagner l'usage de la parole et de la langue polonaise après son attaque. Il livre des réflexions intimes à valeur universelle sur son identité et sur celle des personnes atteintes d'amnésie ou de la maladie d'Alzheimer, mais il demeure néanmoins fidèle à son image. Il reste le miroir de la Pologne dans lequel chacun se reconnaît, sans jamais tomber dans le pathos ou l'ennui.
Aujourd'hui l'auteur maîtrise de nouveau plusieurs langues à l'oral, mais il est heureux d'avoir retrouvé pour son écriture la patrie de sa langue d'origine, le polonais. La thérapie par l'écriture a fonctionné.