« Les gens qui n’ont pas de secrets imaginent que ceux des autres sont obscurs, enfouis. C’est tout le contraire. Les secrets sont éclatants. Ils vous dénudent. Comme l’ampoule nue allumée jour et nuit dans une cellule de prison, ils ne vous laissent aucun répit. »
L’homme dévasté qui livre ici son secret n’a pas même l’espoir d’en être soulagé : il veut seulement faire une brèche dans le petit bonheur de son « veinard de frère américain ». À Amsterdam, un jour d’août 1944, il a vendu aux Allemands la planque d’une famille juive, la famille d’Anne Frank.
Nul goût du pouvoir ou de l’argent chez ce gamin de Hollande, nulle soif de revanche, mais un dévorant besoin d’être aimé à nouveau par son père, qu’il a déçu, et par sa mère, qui s’éloigne chaque jour davantage dans sa propre tristesse. Durant les premières années de la guerre, Joop multiplie les petits boulots, les combines, pour améliorer l’ordinaire. Puis vient l’hiver de la faim. Son père tombe gravement malade, il n’est plus question pour l’enfant de plaire à ses parents mais bien de les sauver.
Avec son vieil ennemi, un oncle pronazi revenu du front de l’Est amputé des deux jambes, Joop se met en chasse. Du travail ? Il n’y en a plus. Que peut-il vendre ? Des adresses. Les Allemands payent ceux qui dénichent pour eux les familles juives dans les caves et les greniers.
Ce roman s’inscrit dans l’espace laissé vide par deux questions non résolues : qui a dénoncé la famille Frank et pourquoi ?