Dans le Tallinn du milieu des années 1990, l’écrivain Jaak Sirkel, auquel Jaan Kross prête ici ses traits, rédige le récit de la vie de son ancien condisciple et ami, Ullo Paerand, dont il a recueilli le témoignage peu avant sa mort. C’est le portrait de toute une génération élevée dans l’Estonie indépendante de l’entre-deux-guerres, qui assiste, impuissante, à son propre drame : l’entrée de l’Armée rouge en juin 1940, l’annexion par l’URSS, l’occupation allemande, la nouvelle occupation soviétique, pour un demi-siècle celle-là, dans l’indifférence générale, avec la complicité des Alliés occidentaux. Jaan Kross brosse ici la fresque de soixante ans de l’histoire tourmentée de son pays à travers le destin particulier d’un de ces héros anonymes qui, en refusant toute forme de compromis avec les nouveaux maîtres du pays, ont passé leur vie en « émigrés de l’intérieur » et sont morts dans l’oubli. Claudio Magris et Doris Lessing voient en Jaan Kross le Thomas Mann des pays Baltes.
Publié en 1998 en Estonie, le treizième des romans historiques de Jaan Kross, traduit dans plusieurs langues, passe pour la réplique contemporaine de son célèbre Fou du tsar qui lui valut de nombreuses récompenses internationales, dont le prix du Meilleur Livre étranger 1990 en France.