Préface de Margot Carlier
L’histoire est simple : pendant la guerre, une Polonaise accepte de devenir la marraine d’une fillette juive, afin de lui fournir un certificat de baptême qui la sauvera peut-être de la mort. Au dernier moment, la femme se rétracte, car, en bonne catholique, elle ne saurait proférer de faux témoignages. Désemparées, la petite fille et sa mère sortent dans la rue, seules, en pleine Occupation allemande.
Cette histoire vraie, Hanna Krall l’avait racontée quatre décennies plus tôt au cinéaste Krzysztof Kieślowski, lequel s’en inspira pour réaliser Le Décalogue 8. Mais, aujourd’hui, il importait à l’auteure de revenir à la vérité nue, forcément lacunaire, et c’est pourquoi elle a bâti sa narration en spirale : les personnes qui ont côtoyé la fillette et sa mère reviennent tour à tour, à des époques et en des lieux différents. Victimes, bourreaux, délateurs, simples témoins ou Justes parmi les nations, il n’en reste désormais que des traces, dans la mémoire ou dans la terre. Magistralement construit, le récit de Krall nous happe, nous enveloppe, nous tient longtemps sous son emprise.