Écrire sur la Pologne avec la légèreté, l’humour et l’acuité d’un Bohumil Hrabal ? C’est ce que réussit Klimko dans un roman qui, à travers les yeux d’un jeune paysan, raconte la guerre, l’instauration du communisme et le bouleversement des frontières – lorsque la Pologne orientale fut annexée par l’URSS et que sa population (plus de deux millions de personnes) a été envoyée repeupler les territoires pris sur l’Allemagne. Antek Barycki et son père, des paysans de la région de Lvov (aujourd’hui Lviv, en Ukraine) ont seuls réchappé au massacre de leur famille par des nationalistes ukrainiens : ce qui n’était autrefois que farces et bisbilles entre voisins s’est mué en une haine inextinguible. La guerre achevée, père et fils s’installent chez une Allemande, dans les territoires annexés. Le jeune Antek, que ses hormones travaillent, n’est pas un héros, pas non plus un salaud. Il était d’accord, en 1939, pour être un bon communiste, puis un bon fasciste, puis à nouveau un bon communiste, car c’est un bon garçon. Il aime les chiffres, il croit désormais en Staline et en l’avenir, il ne croit plus en Dieu, il devient comptable. Le lecteur a le sourire. Les hommes sont les jouets de forces qui les dépassent.